La comorbidité entre la toxicomanie et d’autres troubles de santé mentale a fait l’objet de nombreuses études dans les dernières années (Adlaf et coll., 2005, Kairouz et coll., 2008, SAMHSA, 2010, Jutras-Aswad, 2017). La présence de maladie mentale augmente le risque de souffrir de trouble lié à l’usage d’alcool et ce risque est encore plus important lorsqu’il s’agit de drogues illégales. Les consommateurs de drogues sont quant à eux également plus à risque de développer un problème de santé mentale (Rush et coll., 2008). Les patients ayant un « double diagnostic » ont plus souvent des comportements antisociaux et les problèmes légaux qui les accompagnent. De plus, le risque de suicide chez ces personnes est plus élevé et l’adhésion aux traitements est limitée (Rush et Koegl, 2008 et American Psychiatric Association, 2006, Artenie et coll., 2015, Fournier et coll., 2017).
La complexité des troubles concomitants de santé mentale et de toxicomanie préoccupe depuis nombre d’années les acteurs du réseau de la santé et des services sociaux. L’organisation des services de santé mentale et de dépendance a traditionnellement favorisé le traitement cloisonné des deux problématiques alors que les données probantes et l’expérience d’autres pays démontrent qu’une approche plus intégrée donne de meilleurs résultats. Une telle approche intégrée est exigeante car elle requiert une coordination à plusieurs niveaux et une collaboration de plusieurs partenaires, mais elle est essentielle au rétablissement de la personne.
En 2016, l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS) publiait un rapport intitulé : Modèles de dispensation des soins et services aux personnes présentant des troubles concomitants de santé mentale et de dépendance. Dans ce rapport, les auteurs identifiaient les lacunes de l’offre de service québécoise et recommandaient, en bref :
- La mise en place de modalités concrètes de collaboration sur la base des données connues sur les troubles concomitants et des modèles existants d’organisation des services;
- Une intégration administrative plus efficace des services de santé mentale et de dépendance;
- L’adoption et l’implantation de thérapies intégrées spécifiques à cette clientèle;
- La mise en place de formations destinées aux équipes cliniques en santé mentale et en dépendance;
- Le développement d’activités de recherche évaluative sur les modes d’organisation et d’intervention mis en place.
Bien que la Loi modifiant l’organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par l’abolition des agences régionales adoptée en 2015 au Québec ait permis l’intégration administrative des services de santé mentale et de dépendance dans chaque établissement, on ne trouve pas encore d’orientations ciblées pour la clientèle souffrant de troubles concomitants dans les grands plans d’action nationaux. Il s’agit pourtant de grands consommateurs de soins et services qui sont complexes à traiter et qui requièrent une continuité et une coordination optimale des services.
Une consultation menée par le RUISSS de l’UdeM a montré un large consensus chez ses partenaires concernant les défis liés à une plus grande intégration des soins et des services. Afin de répondre aux besoins des établissements et des équipes dans la mise en œuvre des meilleures pratiques, le RUISSS de l’UdeM a créé en 2017 un Centre d’expertise et de collaboration en troubles concomitants (CECTC).